L’impact de ces départs, principalement alimentés par des jeunes de formation tertiaire confrontés au manque d’emplois dans leurs pays (45% de taux d’emploi au Maroc, 35% en Jordanie contre 72% en UE), ne s’avère cependant pas complètement négatif. Comme l’indique le document “Labour supply, education and migration in South Mediterranean countries “, au lieu de subir le chômage chez eux, ils peuvent ainsi exercer un métier “à la hauteur de leur éducation”.
Le rapport Brain drain in southern mediterranéen countries ajoute que leur départ bénéficie aussi à leurs familles grâce à “leurs envois de fonds importants qui participent à financer l’éducation de ceux restés sur place”. Selon des chiffres basés sur des données 2015 publiés par la Banque mondiale, les sommes envoyées représentent environ en volume l’équivalent de 16% des exportations des pays du Sud de la Méditerranée vers l’UE. Les Egyptiens émigrés dans l’Union européenne expédient ainsi annuellement 1,1 mrd$ dans leur pays d’origine, les Algériens 1,79 mrd$ , les Libanais 1,86 mrd$ , les Tunisiens 2 mrds$ , les Marocains 6,14 mrds$ .
Gain de cerveaux plutôt que fuite des cerveaux
Rym Ayadi, présidente de l’EMEA (Association des économistes euroméditerranéens) et directrice d’Emnes, suggère la mise en place entre les pays de la rive Sud et de la rive Nord de la Méditerranée d’un “système euroméditerranéen régional collaboratif pour mieux gérer ces flux. Ce serait plus efficace et plus productif.”
Pour les auteurs du rapport “Labour supply, education and migration in south mediterranean countries”, poursuivre et appuyer la migration légale ne doit pas exonérer les Etats de “se pencher sur le faible niveau d’instruction et l’inadéquation entre les compétences et les systèmes éducatifs, mais aussi lutter contre le choix dominant de certains domaines d’études, comme les sciences sociales, qui ne correspondent pas aux offres de postes dans leur pays”. Le manque d’emplois demeure le moteur de la migration légale ou illégale, insiste le rapport “Brain drain”. Cette soupape de sécurité entraîne environ 400 000 Méditerranéens du Sud à rejoindre chaque année un pays de l’Union européenne.
“Il faut créer des emplois au Sud de la Méditerranée en conduisant une politique de long terme”, souligne Rym Ayadi. Elle en appelle à “casser la spirale population croissante, faible niveau d’instruction, faibles opportunités de travail, immigration au Nord.”
Lire les documents d’orientation (policy papers) d’Emnes sur le sujet
Labour supply, education and migration in south mediterranean countries : policy challenges and options
Auteure : Cinzia Alcidi
Legal migration pathways across the mediterranean : achievments, obstacles and the way forward
Auteurs : Cinzia Alcidi, Nadzeya Laurentsyeva et Ahmad Wali Ahmad Yar
Brain Drain in southern mediterranean countries : evidence, challenges & policies
Auteurs : Mehtap Akgüç, Cinzia Alcidi et Mattia Di Salvo