L’assureur AG2R LA MONDIALE a bien étudié la question, écouté les offres de plusieurs prestataires (banquiers, gérants d’actifs…), mais non, il a finalement renoncé à recourir à leurs services pour couvrir le risque de son portefeuille actions et a préféré réduire son exposition en cédant pour 500 millions d’euros d’actions (voir l’interview de David Simon, membre du Comité exécutif d’AG2R-LA MONDIALE, page xxx).
Le risque actions taraude en ce moment les assureurs, car cette classe d’actifs leur coûte de plus en plus cher en fonds propres ! En effet, un dampener [1] rend le coût des actions plus élevé quand le marché a progressé. Olivier Gour, responsable des portefeuilles de placements actions cotées chez Crédit Agricole Assurances, a fait le calcul suivant : « Fin 2016, le coefficient d’ajustement symétrique (qui permet de calculer le dampener) appliqué aux actions était de -4,3 %. Ainsi, la charge en capital s’élevait à 34,7 % (39 -4,3) pour des actions de type 1 (zone OCDE). Fin 2017, ce coefficient était d’environ 2 %, ce qui portait la charge en capital à 41 % (39+2). Aujourd’hui, ce coût en capital est de 42 % pour un même portefeuille d’investissement. Donc, aujourd’hui, la charge en capital a progressé de 20 % uniquement car le marché actions a progressé. »
Dans ce contexte, Crédit Agricole Assurances a lui aussi étudié l’offre de plusieurs prestataires, l’objectif étant de diminuer la charge en capital en réduisant le risque lié à la détention d’actions. Il a finalement choisi une stratégie optionnelle, avec un fonds d’actions protégées mis en place par le gérant d’actifs CPR AM.
Les banquiers eux aussi proposent différents outils pour couvrir les risques de marchés : note émise par un SPV (Special Purpose Vehicle), caps CMS pour se couvrir contre le risque de taux, CDS (Credit Default Swap)… Les banques s’adressent directement aux assureurs ou proposent leurs outils aux Asset Managers.
La réassurance peut, elle aussi, constituer une aide pour les assureurs, mais les produits les plus coûteux et les plus sophistiqués ne sont pas forcément les plus intéressants. Selon David Simon, « nombre d’assureurs continuent de recourir à la réassurance en quote-part, c’est-à-dire la réassurance “à l’ancienne”. J’ai le sentiment que les offres plus récentes, nées avec l’arrivée de Solvabilité 2, se sont peu développées. Il s’agit, avec ces produits plus sophistiqués, de transférer au réassureur uniquement les queues de distribution, c’est-à-dire les événements rares qui sont coûteux sous Solvabilité 2. »
Ces outils aident les assureurs dans l’environnement Solvabilité 2, mais ceux-ci demeurent globalement insatisfaits de cette réglementation. Une réforme de cette directive est en cours. EIOPA a publié un texte le 30 octobre dernier et un second est attendu pour ce mois de février, mais les modifications devraient être marginales. Axel James, Senior Manager au sein d’EY, précise qu’« un “call for advice” a été envoyé début novembre par l’autorité européenne aux professionnels de l’assurance sur l’évolution de la directive. Les réponses apportées vont aboutir, courant février-mars 2018, à la publication d’un avis pour l’évolution future de Solvabilité 2 proposé par l’EIOPA auprès du Conseil de l’Europe. »
Mais la préoccupation réglementaire majeure qui se profile à l’horizon est d’ordre comptable. IFRS9 est déjà une réalité pour quelques assureurs, par exemple Crédit Agricole Assurances. Les modifications liées à IFRS 9 généreront très probablement des réflexions qui devront prendre en considération une autre nouvelle norme, IFRS 17, qui porte sur les passifs d’assurance. Comme l’explique Ludovic Antony, ingénieur financier chez Société Générale CIB, en charge du conseil aux assureurs et fonds de pension, « l’évaluation des passifs évoluera en fonction des taux de telle sorte que les assureurs devront aligner les choix faits à l’actif et au passif pour gérer la volatilité des fonds propres et/ou du résultat qui seront sensibles à tout manque d’adossement » (voir son interview, page xxx).
En matière comptable, les offres sont encore peu développées, mais le marché sera sans doute fructueux.