En attendant la future réforme du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, Jacques Avrillon, Co-président de l’Union nationale des associations de lutte contre les inondations (Unacli) revient sur les principaux thèmes du futur texte, sur les limites du système actuel et sur les pistes à développer pour lutter contre les dommages liés aux inondations.
Que pensez-vous de réformer le régime d’indemnisation des « Cat Nat » ?
Cette réforme vient à la base d’une directive du Parlement Européenne, c’est donc une bonne chose. Cela fait 30 ans que notre système n’a pas été réformé, il faut maintenant rattraper notre retard. Outre les catastrophes comme Xynthia ou les inondations du Var en 2010, les crues de l’Oise en 1995 ont couté à titre d’exemple 1Md d’euros. Cela fait 60 ans que l’on n’a pas vraiment pensé sérieusement à la prévention des risques d’inondation dans notre pays et il faut maintenant que nous améliorions les moyens de prévenir ou de contenir les risques d’inondations.
Il est question d’intensifier les actions de prévention. Qui sera concerné ?
La prévention va concerner tout le monde, les particuliers, les entreprises, les collectivités publiques ou encore les communes qui gèrent le territoire. On va demander aux particuliers par exemple de faire le nécessaire pour réduire la vulnérabilité de leurs habitations et de faire en sorte que le préjudice causé par l’inondation soit moins important qu’à l’heure actuelle.
Le problème c’est qu’on ne donne aucun avantage en contrepartie aux victimes. Après une crue, ces dernières vont se retrouver en situation de rebâtir, de réaménager, et on va on leur demander en plus des charges liées à la prévention. Il serait souhaitable qu’il y ait un effort de fait, par exemple un dégrèvement d’impôt.
Une modulation tarifaire est également envisagée. Quelle est votre position ?
Nous nous opposons à la modulation des surprimes sur le principe d’égalité et de solidarité qui est édicté dans l’Alinéa 12 du préambule de la Constitution Française.
Finalement, il n’y aurait que les grosses entreprises et les grosses collectivité qui seraient concernées par une probable modulation tarifaire. Les assureurs défendent eux aussi leurs intérêts, mais il faut qu’ils le fassent sans surcharger outre mesure les victimes. A terme, la modulation tarifaire pourrait inciter à réduire la trop grande tendance des collectivités locales à installer des entreprises et urbaniser encore dans des zones inondables.
Qui selon vous doit contrôler les plans de prévention ?
Nous considérons que c’est un des rôles régaliens de l’État d’assurer et de contrôler ce qui se fait dans ce domaine. D’autant que les problèmes d’inondations deviennent de plus en plus graves. C’est lui, à travers les préfectures, qui doit vérifier qu’on ne va pas bâtir sur des zones inondables, qu’on va bien mettre en application un certain nombre de directives. La reconnaissance des zones de catastrophe naturelles doit elle aussi rester sous le contrôle de l’État.
Que pensez-vous de la création de l’Observatoire des risques naturels ?
L’observatoire des risques naturels va permettre de fiabiliser, de répertorier ou de connaître un certain nombre de phénomènes liés aux catastrophe naturelles, que ce soit en sous forme administrative, matérielle ou climatiques. Cela nous permettra ensuite de mieux combattre ces phénomènes et cela nous paraît donc intéressant.
Quid des risques climatiques à l’avenir ?
Il va y avoir des zones de grandes difficultés à l’avenir. Par exemple, l’inondation n’est pas spontanée, elle vient de plusieurs facteurs (bassin versant, agriculture, développement industrielle et urbain, aménagement du territoire, etc) qui font que la topographie a beaucoup changé ces dernières années.
Ces phénomènes climatiques de fortes intensité vont aller en s’accentuant. Il y a quelques années nous étions environ 4 à 5 millions de personnes inondées sur le territoire, nous sommes aujourd’hui plus de 6 millions. On sait que deux tiers des communes du territoire on déjà été touchées par des inondations et dans 20 ans qui entre 17 et 20 millions de personnes seront touchées par une inondation en France avec près de 9 millions d’emplois suspendus ou supprimés.