En 2019, la publication du très pessimiste rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a provoqué une forte prise de conscience, par le grand public, des conséquences des risques environnementaux pour la société. De leur côté, les assureurs ont identifié depuis plusieurs années déjà le changement climatique comme le risque le plus important, susceptible d’engendrer des catastrophes naturelles aux lourdes conséquences sur les populations et l’économie, comme des pertes récurrentes de récoltes en agriculture. Mais chaque risque émergent amène aussi l’opportunité de développer de nouveaux produits et activités. Le nerf de la guerre : l’évaluation du risque et la bonne tarification de l’offre.
Si le régime des catastrophes naturelles (régime Cat Nat) est équilibré en moyenne, il doit permettre de constituer des réserves pour faire face à la volatilité importante de la sinistralité et aux événements à venir, qui peuvent être extrêmes, prévient David Moncoulon, directeur de la modélisation, Risques Cat & Agriculture chez le réassureur CCR.
Fabienne Chapelain, responsable Amont Agricole au sein du pôle Bessé Agro, observe pour sa part que les innovations sont possibles et nombreuses en matière d’assurance agricole, dès qu’elles sont développées au sein de groupements, coopératives, ou filières structurées.
Avec le changement climatique, ce sont les nouvelles technologies et l’instabilité sociale et politique qui viennent composer le trio de tête des risques émergents prépondérants à l’horizon des cinq prochaines années, selon toutes les études menées par la profession. Des risques qui ont en commun d’ignorer les frontières et de suivre une évolution incertaine, à court et moyen terme, faite de ruptures brutales.
L’instabilité géopolitique constitue ainsi, dans la deuxième édition du baromètre des risques pour le secteur de l’assurance et de la réassurance en France mené par la FFA (Fédération française de l’assurance), le risque qui a le plus progressé ces derniers mois parmi les préoccupations de la profession, grimpant de huit places en un an ! La montée du populisme et du protectionnisme, les doutes sur la capacité des gouvernements à gérer les crises à venir, obligent le marché privé de l’assurance à concevoir de nouvelles offres pour les acteurs du commerce international, afin de sécuriser contrats et investissements à l’étranger, détaille Jean-Baptiste Ory, responsable du pôle Risques politiques chez AON France.
Nouveaux risques, nouvelles opportunités
Quant aux risques technologiques, ils gagnent en complexité chaque année, donnant naissance à de nombreux autres aléas, d’ordre sociétal et géopolitique. Si le véhicule véritablement autonome ne circule pas encore dans nos rues, Alexandra Cohen-Jonathan, associée chez August Debouzy, souligne ainsi l’incidence que pourrait avoir très prochainement l’intelligence artificielle appliquée au secteur automobile sur les régimes de responsabilités. Autant de nouvelles problématiques pour les assureurs.
D’ici trois ans, de nouveaux lanceurs, développés par Arianespace, SpaceX, Mitsubishi Heavy Industries ou Blue Origin, la filiale d’Amazon, vont mettre en orbite quantité de satellites de nouvelle génération. Or, la souscription de l’assurance « lancement » constitue la clé de voûte des conventions de crédit mises en place dans le financement de ces programmes satellites, relève Martin Jean-Baptiste, senior vice-president chez Aon International Space Brokers France.
Quant à l’immense marché de l’assurance cyber, enjeu majeur pour toutes les entreprises, il reste encore balbutiant, rappelle Bernard Spitz, Président de la Commission sur le risque cyber du Club des juristes. En France comme au niveau mondial, le secteur s’organise pour le développer.
Un an après l’entrée en vigueur de la DDA, quel bilan ?
Dans ce contexte de bouleversements à l’échelle planétaire, la profession doit composer avec un nouveau cadre réglementaire. Un an après son entrée en vigueur définitive en droit français, quel bilan faire de la directive sur la distribution d’assurances (DDA) ? Ludovic Daugeron, responsable juridique métier & conformité de Planète CSCA, estime que la nouvelle réglementation crée des passerelles juridiques entre assureurs et courtiers d’assurance. Ceux-ci craignent l’instauration d’un contrôle de l’assureur sur une partie de leur activité de distribution. Robert Devin, Consultant fondateur de Regalex, livre quant à lui son analyse des difficultés d’application liées aux nouvelles obligations de formation et de développement professionnel continus des courtiers d’assurance ou de réassurance.